Présentations - session 9

Présentations orales - Session  jeux en pédagogie (2)

Mardi 14 mai - 16h10 - 17h10
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Le jeu en grammaire en cycle 3 : une étude de cas
Jessyca TRETOLA
Aix-Marseille Université, EA 4671 ADEF, 13248 Marseille, France


Selon la définition générale du trésor de la langue française informatisé, le jeu est « une activité divertissante soumise ou non à des règles, pratiquée par les enfants de manière désintéressée et par les adultes à des fins parfois lucratives », cette activité est essentielle chez l’enfant. Le jeu peut être également une activité ludique organisée à des fins pédagogiques. De nos jours où l’on parle d’innovation pédagogique, les activités ludiques pourraient correspondre à une forme d’innovation en classe et notamment à l’école primaire. Mais qu’en est-il des apprentissages ?

Notre problématique repose sur la place occupée par le jeu dans les apprentissages fondamentaux et plus particulièrement, pour cette recherche, en français. En ce sens, les questions de recherche que nous nous posons sont les suivantes :

Un dispositif ludique en grammaire favorise-t-il les apprentissages ? Permet-il aux élèves de s’impliquer davantage dans la tâche ? qu’en est-il de leur motivation ?

Selon Brougère (2015, p.144), « il faut admettre que l’apprentissage ne relève pas du dispositif proposé, de la situation (éducative ou ludique) mais de l’effet qu’elle a sur l’enfant ». En ce sens, cette communication se propose de rendre compte d’une étude de cas, concernant la mise en œuvre d’un jeu de « Cluedo » adapté à la grammaire, d’une séance filmée en classe de cycle 3. L’étude de cas permet, selon Gagnon (2012), une compréhension plus profonde des phénomènes, des processus et des personnes impliquées. Cette méthode s’apparente donc à la méthode qualitative. Notre recherche porte sur l’observation d’un dispositif mis en œuvre et pensé par l’enseignante (et un chercheur en sciences de l’éducation) ainsi que sur l’implication des élèves dans l’activité ludique concernant le « passé composé ». Cette activité ludique a ensuite donné lieu à une production d’écrit dans laquelle le « passé composé » devait être réinvesti par les élèves dans l’écriture d’un nouveau scénario de jeu de « Cluedo ». De ce fait, des entretiens enregistrés ont été réalisés avec l’enseignante de la classe et des questionnaires ont été distribués aux élèves, afin de connaître l’impact du jeu au niveau de la motivation et de l’implication des élèves dans la réalisation de la tâche. Notre cadre institutionnelle repose sur les programmes de l’Éducation nationale Bulletin Officiel spécial du 26 novembre 2015 de cycle 3 qui préconisent l’articulation des « activités de lecture, d’écriture et d’oral complétées par des activités plus spécifiques dédiées à l’étude de la langue (grammaire, orthographe, lexique) qui permettent d’en comprendre le fonctionnement et d’en acquérir les règles » (p. 98). L’étude de la langue a une place spécifique dans les programmes car elle permet donc de travailler aussi bien sur la compréhension en lecture que sur la production d’écrits. Le bulletin officiel préconise également d’impliquer les élèves dans leurs apprentissages. Notre cadre théorique s’appuie sur la théorie anthropologique du didactique (Chevallard, 2010) qui va nous permettre d’analyser les praxéologies (types de tâche et technique pour le bloc de praxis et technologie et théorie pour le bloc du logos) de l’enseignant et des élèves lors d’une activité ludique en français afin de comprendre ce que justifie la pratique de l’enseignante et ce qui la justifie et l’investissement des élèves dans la tâche et ce qui la justifie également. Nous nous appuyons également sur la didactique du français (Garcia-Debanc, Paolacci & Boivin, 2014) et sur la motivation intrinsèque (Bourgeois, 2011) que peut provoquer le jeu en ce qui concerne les apprentissages fondamentaux chez les élèves, car il apparaît que le jeu proposé sur la conjugaison des verbes au passé composé motive les élèves à entrer dans la tâche. La coopération entre élève permet également de réussir la tâche proposée par l’enseignante. Après le jeu, tous les élèves de la classe ont réalisé une production d’écrit en utilisant des verbes conjugués au passé composé.

Bourgeois, É. (2011). Chapitre 16. La motivation à apprendre. Dans : Étienne Bourgeois éd., Apprendre et faire apprendre (pp. 233-253). Paris cedex 14, France: Presses Universitaires de France. doi:10.3917/puf.brgeo.2011.01.0233.
Brougère, G. (2005). Jouer/apprendre, Broché : Paris.
Brougère, G. (2015), Jeu et apprentissage à l’école maternelle : mythe ou réalité ? dans Jeu et temporalité dans les apprentissages, Fname, Retz : Paris.
Chevallard, Y. (2006). La théorie anthropologique des faits didactiques devant l’altérité culturelle et linguistique. Le point de vu d’un outsider. Conférence plénière donnée le 24 mars 2006 au colloque construction identitaire et altérité : création curriculaire et didactique des langues, Université de Pontoise, 24 et 25 mars 2006.
Chevallard Y. (2010). La didactique, dites-vous ? Education & didactique, 4.1, 139-146.
Gagnon, Y.-C. (2012), L’étude de cas comme méthode de recherche, Presse de l’Université du Québec.
Garcia-Debanc C., Paolacci V. et Boivin M. et C., L’étude de la langue : des curricula aux pratiques observées, Repères, 49 | 2014, 7-32.
Ministère de L’Éducation Nationale, Bulletin Officiel spécial du 26 novembre 2015.
Viau, R. (2000). La motivation en contexte scolaire : les résultats de la recherche en quinze questions. Vie pédagogique n°115. (pp.5-8)
Viau, R. (2000), Des conditions à respecter pour susciter la motivation des élèves, Correspondance, Volume 5, numéro 3, Université de Sherbrooke.
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Les mécanismes de l'acquisition lexicale appréhendés par le jeu sérieux
Stelene Huret-Moreau
Doctorante contractuelle sous la direction de M. Gabriel Bergounioux
Laboratoire Ligérien de Linguistique (LLL) – Université d'Orléans
UMR 7270 CNRS – BNF


L'acquisition lexicale d'une langue ne se limite pas à la mémorisation des mots, mais comprend aussi leur réutilisation dans des contextes similaires, puis différents. La structure de la langue et l'organisation discursive sont les principales approches de l'apprentissage en tant que paramètres internes. Nous souhaitons y ajouter des paramètres externes, tels que l'impact de l'investissement émotionnel, ou le contexte d'apprentissage. En ce sens, l'esthétique peut contribuer à l'exploitation de l'affect. En effet : l'art, sous toutes ses formes, touche, et influe sur la mémoire ; il nous semble donc judicieux de l'exploiter dans le cadre de l'acquisition lexicale de la langue française.

À l'aube d'une nouvelle ère technologique, la pédagogie numérique se développe grâce à des outils didactiques de plus en plus nombreux. Le jeu vidéo est depuis quelques années considéré comme une forme d'art, liant aux aspects visuels et sonores l'intégration de l'utilisateur. Notre recherche débute par la conception et le développement d'un serious game, destiné à un groupe d'apprenants de Français Langue Étrangère. Une fois le jeu développé, il sera alors possible de déterminer l'apport ludique dans l'apprentissage de la langue, et plus spécifiquement dans l'appropriation lexicale. Ce serious game se présentera comme un jeu de rôle, dans lequel l'apprenant incarnera un personnage menant à bien des quêtes sous la forme de plusieurs mises en situation réalistes. Le sujet, sensibilisé à ces scènes de la vie quotidienne par le biais du jeu, sera plus à l'aise pour les appliquer dans la réalité.

Enfin, il nous sera possible d'enrichir le corpus d'ESLO2 (Enquête SocioLinguistique à Orléans) en enregistrant les apprenants pendant et après leur apprentissage. Cette enquête répertorie un grand nombre d'enregistrements sonores et audio-visuels, dans le but d'illustrer la ville et de dresser un portrait de la ville d'Orléans. Ces supports nous permettront aussi de cibler les progrès attendus, et d'adapter l'amélioration de notre serious game. Il conviendra par la suite d'établir les cont
extes bénéfiques à l'acquisition lexicale, dans le but de nous rapprocher de l'idéal du jeu sérieux.

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Jouer pour enseigner et comprendre l’évolution du vivant et le hasard au collège
H. Armand, P. Brandt-Pomares, J. Castéra, C. Coiffard Marre, M. Coupaud, A. Delserieys, C. Jégou, J. Gobert, S. Marchi, M. Rotenberg, E. Tortochot
ADEF, Aix Marseille Université


Depuis plus d’un siècle, la pensée darwinienne est « la toile de fond de toute la science biologique » (Heams et al, 2011, p. 15). Des générations de chercheurs ont permis de faire évoluer cette pensée au gré de nouvelles découvertes et des évolutions technologiques. De nos jours, la théorie de l’évolution est au cœur de la biologie moderne, mais aussi un enjeu d’enseignement pour comprendre la biodiversité et les risques liés à l’activité humaine pour préserver cette biodiversité. Cependant, malgré un très large consensus au sein de la communauté scientifique, des résistances perdurent au sein de la société civile et rendent difficiles son enseignement et son apprentissage. Ces résistances peuvent être très fortement associées à un système de croyances créationnistes. Elles peuvent aussi s’expliquer du fait de la complexité des savoirs en jeu et des démarches de raisonnement qui se situent entre une approche expérimentale et une approche historique (Coupaud, 2018). Aussi, les conceptions relevées chez des collégiens (11-16 ans) sont très empreintes d’une vision finaliste, conceptions incompatibles avec une entrée dans la pensée évolutionniste. Pour aller au-delà d’une telle pensée finaliste, le hasard joue un rôle primordial, sous différentes formes définies en particulier par Gayon (2005) : la chance (ou élément fortuit), l’aléatoire et la contingence. Une étude précédente mis en évidence des liens significatifs entre conceptions sur le hasard et conceptions sur l’évolution du vivant chez des collégiens (Coupaud, 2018). Parmi les 1600 élèves interrogés, cette étude a aussi mis en évidence que plus d’un tiers des élèves rejette l’évolution du vivant.


Cette présentation s’inscrit dans le cadre d’un projet financé par l’Agence Nationale de la Recherche (ANR). Ce projet, intitulé EGRESS (Educational Game about Randomness & Evolution for Students in Science), s’intéresse à l’enseignement et à l’apprentissage de la théorie de l’évolution en mettant l’accent sur le concept de hasard dans un contexte mettant les apprenants dans une situation a-didactique, sortant des cadres traditionnels d’enseignement. Ainsi, ce projet a pour but de concevoir un jeu que les enseignants du premier cycle du secondaire pourront utiliser avec leurs élèves (âgés de 12 à 15 ans). L’objectif est de permettre aux élèves, par l’intermédiaire du jeu, de manipuler les trois sous-concepts de hasard définis par Gayon (2005) nécessaires à la compréhension des mécanismes de l’évolution : la chance (ou élément fortuit), l’aléatoire et la contingence.

La conception d'un tel jeu repose sur 4 idées fondamentales :
1) l'identification des représentations des élèves sur le hasard et l’évolution du vivant pouvant constituer des obstacles à l'apprentissage à partir d’un questionnaire de type « concept inventory » (Coupaud, 2018),
2) la gamification du contenu afin de permettre aux élèves de manipuler les différents concepts de hasard et d’évolution du vivant dans un jeu de société,
3) l'utilisation de la réalité augmentée afin de rendre tangible des concepts complexes,
4) le processus de méta-conception de l’artefact (le jeu) afin d'impliquer les utilisateurs finaux (enseignants et étudiants) dans la conception du jeu.

L’objectif de cette communication est de présenter les premières bases de conception du jeu, et en particulier, les éléments de contexte proposés pour le jeu, ainsi que les mécaniques de jeu envisagées pour permettre de manipuler les trois formes de hasard (chance, aléatoire, contingence) nécessaires à une meilleure compréhension des mécanismes de l’évolution. Il s’agit, dans la présentation, de discuter de l’intégration d’un jeu de plateau dans une situation de classe pour aborder, avec les élèves, un sujet qui ébranle souvent des croyances construites dans la sphère personnelle (en particulier créationnistes). L’objectif est aussi de proposer une réflexion épistémologique sur l’articulation entre des mécaniques de jeu et les enjeux didactiques de l’enseignement de l’évolution du vivant et du hasard.

Coupaud, M. (2018). Évolution du vivant et hasard : étude quantitative des conceptions d’élèves de collège dans le contexte français (Thèse de doctorat). Aix-Marseille Université.〈tel-01979714〉
Gayon, J. (2005). Évolution et hasard. Laval théologique et philosophique, 61(3), 527-537.
Heams, T., Huneman, P., Lecointre, G. & Silberstein, M. (2011). Introduction. Dans : T. Heams, P. Huneman, G. Lecointre & M. Silberstein (Dir), Les mondes darwiniens : L’évolution de l’évolution. Volume 1 (pp. 15-21). Paris : Editions Matériologiques.